Paul Poiret (1879–1944), l’un des couturiers les plus audacieux et influents du début du XXe siècle, peut être considéré comme le père de la haute couture moderne.
Cette exposition, thématique et chronologique, est répartie sur deux étages ; elle montre les talents divers de Paul Poiret tout en dévoilant les évènements marquants de sa vie. « Je suis un artiste pas un couturier » disait-il.
Son inspiration s’est en effet exercée dans plusieurs domaines : vestimentaire, théâtral, parfum, art décoratif mais aussi peinture, gastronomie…
Paul Poiret se forme aux côtés de Jacques Doucet puis rejoint la maison Worth en 1901. Le métier de couturier, le contact avec les clientes et le travail en équipe lui donnent l’impulsion pour établir sa propre maison de couture en 1903. Il crée une nouvelle esthétique du corps féminin, en mouvement et sans corset, sa ligne est d’une grande modernité, les tissus légers et les couleurs vives. Il s’inspire du fauvisme, courant artistique du début du XXe siècle qu’il apprécie.
Les robes du soir, les manteaux, les costumes de spectacles sont colorés, dans des matières nouvelles. On peut admirer par exemple :
– La « Robe, Martinique » (1922) en crêpe marocain et crêpe de chine, qui évoque le kimono que Paul Poiret réinterprète dans ses collections, portée par Louise Janin ;
– La « Robe en deux parties, Mandchoue » (1923) en soie lamée et velours de soie ;
– La « Robe exotique » (1922) en crêpe de chine, mousseline de soie, passementerie et perles de jais.
Paul Poiret a aussi participé à la rénovation des arts décoratifs. En 1911, il fonde la société « Martine », (prénom de sa fille cadette) dédiée à la décoration d’intérieur qui comprend une école et un atelier. Le paravent à trois feuilles (1912-1913) est une illustration de la production de mobilier proposée par cet atelier.
Paul Poiret est le premier couturier à produire des parfums en créant en 1911 la société « Les Parfums de Rosine » en hommage à sa fille aînée, Rosine Poiret, née en 1906. Les flacons de parfums, cartes parfumées, catalogues publicitaires exposés témoignent de la production de la maison Rosine.
Le domaine culinaire ne le laissait pas non plus indifférent ! Un livre recueillant 107 recettes de Paul Poiret rappelle qu’il aimait l’art de la table et la gastronomie.
Après la Première Guerre mondiale, son style tombe en désuétude face à des créateurs comme Coco Chanel. Paul Poiret retrouve l’inspiration grâce à ses voyages et les fêtes somptueuses qu’il organise. Ses différents voyages en Europe et au Maghreb le marquent et il retranscrit ses impressions dans ses mémoires, « En habillant l’époque » (1930). Il réemploie les tissus et broderies qu’il rapporte de voyage dans ses créations vestimentaires, parfois nommées de noms de lieux qu’il a visités, Marrakech, Tolède…
L’exposition rend compte également des fêtes spectaculaires où il y invite ses amis artistes comme Kees van Dongen, Dunoyer de Segonzac… avec le Tout-Paris mondain. Ces soirées constituent aussi des événements publicitaires pour sa maison de couture.
Les photos des péniches Paul Poiret « Amours, Délices et Orgues » amarrées quai d’Orsay, lors de l’exposition internationale des Arts décoratifs et industriels modernes de Paris 1925 en témoignent. Une tenture De Raoul Dufy « La présentation des mannequins chez Poiret » est la huitième d’un ensemble de quatorze toiles destinées à habiller les murs de la péniche. Il n’hésitait pas à faire appel à de grands artistes pour participer à ses œuvres et ses décors.
L’exposition invite à découvrir Paul Poiret au sein de sa vie privée à travers des photos de famille comme celle où sa femme Denise porte la robe Mythe ou Faune conçue par son mari. Une photo montre Denise Poiret et ses enfants dont une partie de leur tenue vestimentaire est aussi exposée : « Costume marin » (1922) ayant appartenu à Colin Poiret ; « Robe » (1912) ayant appartenu à Rosine Poiret.
Enfin, une photo de la nature morte composée d’une jardinière de roses « Nature morte aux fleurs » (1927), et « La femme au pantin » (1930) montrent que Paul Poiret s’est aussi aventuré dans la peinture.
Sa participation à l’Exposition internationale des arts décoratifs de 1925 a été un gouffre financier. C’est sur ses fonds propres qu’il avait affrète trois péniches pour présenter son univers, couture, décoration intérieure et parfums. Il est forcé de vendre sa maison de couture fin 1924 et de la quitter en décembre 1929.
Paul Poiret a laissé un héritage stylistique durable et a inspiré plusieurs couturiers tels que Christian Dior, Karl Lagerfeld, Yves Saint Laurent.
L’exposition du musée des Arts décoratifs, qui montre l’étendue et l’influence de ses talents, rend un bel hommage à Paul Poiret.
Commissariat : Marie-Sophie Carron de la Carrière, conservatrice en charge des collections mode et textile 1800-1946,
assistée de Marie-Pierre Ribère, attachée de conservation, collections mode et textile.
Rédaction : Annick C. , septembre 2025
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