Visite de l'exposition

L’exposition dresse un panorama des « images visionnaires » et des effets induits par l’ayahuasca, ce breuvage hallucinogène qui occupe une place très importante dans la vie sociale et artistique de nombreuses sociétés autochtones d’Amazonie, dont l’Amazonie péruvienne : de l’iconographie géométrique des Shipibos-Konibos (Pérou)  aux productions littéraires (William S. Burroughs, Allen Ginsberg) et audiovisuelles (Jan Kounen) des 20e et 21e siècles.

Ce breuvage est un mélange obtenu à partir de deux substances principales : l’une produit des hallucinogènes, tandis que l’autre sert à inhiber les enzymes de l’estomac visant à détruire les hallucinogènes.

Traditionnellement ingéré dans un cadre chamanique, il a pour but de permettre la pratique de la divination, de la magie, est utilisé aussi pour la magie amoureuse.
Les visions ou hallucinations produites par ce breuvage sont également une puissante source d’inspiration pour les artistes autochtones d’Amazonie péruvienne.
Les dessins à base de motifs géométriques sont fréquemment présents dans les productions artistiques.  On les retrouve sur :
– Les peintures murales, les teintures sur toile comme les teintures végétales sur toile de coton sauvage de Sara FLORES (Sans titre, 2021)
– Les vêtements : « jupes en coton brodé» de Marly REATEGUI MORI
– Les objets : Pagaie décorée par un artiste inconnu
– Les accessoires tels que des bracelets, des masques…

Ces dessins géométriques nommés « kené » nous plongent dans un univers labyrinthique où se répètent d’innombrables  formes. Ces formes sacrées représentent le maillage du monde et l’essence de la vie.
On remarquera aussi les œuvres des artistes :
– Chonon BENSHO, « La belle femme de la jungle ». Broderie de fil sur coton brut
– Celia VASQUES YUI et ses production en argile

A partir des années 1980, une nouvelle génération d’artistes utilisant la peinture visionnaire amazonienne a émergé.
Les acryliques sur toile « Les Rêves de la sirène » d’Anderson DEBERNARDI, « Le bananier et son maître », 2015 de Lastenia CANAYO, « La vision de l’arc en ciel, le mode jaune » de Roldan PINEDO sont représentatives de ce nouveau courant.

Différents thèmes de revendications telles que la déforestation, la gestion de l’eau, l’impact sur la condition de vie des autochtones, se révèlent dans les dessins et peintures.

Les hallucinogènes ont fini par intriguer et intéresser les occidentaux. L’ayahuasca s’est mondialisée dans la seconde moitié du XXe siècle. William Burroughs et Allen Ginsberg sont les pionniers du tourisme chamanique.

Cette exposition permet au visiteur de faire une expérience neurophysiologique avec « La dream machine ». Il s’agit d’une expérience stroboscopique qui modifie notre état de conscience : après avoir regardé cette machine dissipant des scintillements lumineux, le visiteur voit apparaître, les yeux fermés, un ensemble de formes et de couleurs.

Des artistes occidentaux ont été influencés par les visions produites par la consommation de l’ayahuasca. Ils ont utilisé les nouvelles technologies telles que l’image de synthèse, l’art numérique, ou la réalité virtuelle pour reproduire l’expérience de cette plante.
L’artiste français Jan KOUNEN a été bouleversé par la découverte de l’ayahuasca auprès des Shipibo-Konibo en 1999.  Il a mémorisé les visions produites par l’ayahuasca sur des aquarelles que le visiteur peut contempler.
Une expérience immersive réalisée par cet artiste plonge le visiteur dans « un voyage cosmique ». Le visiteur y retrouve des figures géométriques et organiques récurrentes.

Des recherches scientifiques afin de mieux connaître les potentialités de cette plante dans le domaine de la santé ont permis d’en approfondir la connaissance.  L’exposition montre l’intérêt de la communauté scientifique et culturelle pour cette substance et ses effets.

Commissariat : David Dupuis, Docteur en anthropologie, chargé de recherche à l’INSERM (IRIS/EHESS), assisté par Élise Grandgeorge, doctorante en Histoire de l’art contemporain, Université Paris Nanterre, Laboratoire HAR

Rédaction Annick C., mars 2024